Hépatite C : les premières recommandations de l’OMS

Hépatite C : les premières recommandations de l’OMS, Aude Lecrubier

Auteurs et déclarations 11 avril 2014

Londres, Royaume-Uni – L’avènement de nouveaux traitements de l’hépatite C plus efficaces et plus surs et la promesse de l’arrivée d’autres agents toujours plus performants a incité l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) à publier ses premières recommandations sur le dépistage, la prise en charge et le traitement de l’hépatite C [1].

oms logoLes recommandations ont été présentées lors de de la cérémonie d’ouverture de l’International Liver congress 2014, rendez-vous des hépatologues du monde entier (9-13 avril, Londres) organisé par l’European Association for the Study of Liver.

L’OMS rappelle que l’infection par le virus de l’hépatite C touche 130 à 150 millions de personnes et en tue 350 000 à 500 000 chaque année.

En tout 9 recommandations clés sont retenues avec pour objectif d’augmenter l’accès au dépistage, de mieux prévenir et prendre en charge les lésions hépatiques et de guider le choix thérapeutique.

L’OMS opte pour le dépistage ciblé sur les personnes à risque

L’OMS recommande de réaliser un premier test de dépistage chez les personnes à risque (en cas d’interventions médicales ou dentaires, transfusions, injections, tatouages ou piercing dans des situations à risque, VIH, naissance d’une mère infectée par le VHC, administration de drogues par voie intranasale, prison) puis un autre test en cas de séropositivité pour confirmer le diagnostic d’hépatite C chronique.

Donc pas de dépistage systématique de tous les adultes une fois dans la vie tel que demandé par certains experts, français notamment.

Prise en charge des lésions hépatiques : dépister l’alcoolisme

L’alcool étant un facteur aggravant des lésions hépatiques induites par l’hépatite C, l’OMS conseille désormais d’évaluer la consommation d’alcool les personnes atteintes de l’hépatite C et d’encourager, si nécessaire, un changement de comportement.

Elle offre également des conseils sur la sélection des tests les plus appropriés pour évaluer le degré d’atteinte hépatique chez les patients atteints d’hépatite C chronique. Lorsque les ressources sont limitées, l’OMS propose d’utiliser l’index APRI (aminotransferase/platelet ratio index) ou le Fib-4 (AST, ALT, PLT) pour évaluer la fibrose plutôt que l’élastrographie ou le fibrotest (Bili, γGT, Hapto, α2MG, Apo A1) (Recommandation conditionnelle, faible niveau de preuves).

Le Fibroscan est à privilégier lorsque les équipements sont disponibles et que les coûts du test ne sont pas un obstacle.

Prévenir la transmission et informer

Ces recommandations de 2014 résument les interventions à mettre en place pour prévenir la transmission de l’hépatite C et notamment les mesures pour assurer la sécurité des procédures médicales et des injections dans les structures de soins ou chez les personnes s’injectant des drogues. « Les taux de nouvelles infections restent hauts dans beaucoup de pays en raison d’une réutilisation du matériel d’injection et de l’absence de dépistage sur les échantillons de transfusion. C’est inacceptable », indique l’OMS.

Enfin, l’organisation rappelle que beaucoup de personnes infectées ignorent leur séroposivité et insiste sur les efforts à fournir en matière d’information et d’éduction de la population générale et de capacité de dépistage et de traitement.

Traitements : les nouveaux antiviraux au premier plan

Les recommandations concernent les traitements classiques et les nouveaux traitements. Elles seront réactualisées périodiquement en fonction des nouvelles AMM.

Tout comme dans les recommandations américaines publiées récemment, les antiviraux et notamment les nouveaux antiviraux de seconde génération sofosbuvir (Sovaldi®, Gilead science) et siméprévir (Olysio®, Janssen Pharmaceuticals), prennent une place de plus en plus importante dans ce nouveau texte. L’OMS précise qu’elle a établi ses recommandations sans prendre en compte le coût de ces nouvelles molécules. Une question pourtant cruciale…

Les antiviraux télaprévir et bocéprévir

Chez l’adulte infecté par le VHC de génotype 1, l’OMS recommande d’ajouter les anti-protéases télaprévir (Incivo®, Janssen Cilag), ou bocéprévir (Victrelis®, Schering-Plough) à l’association classique d’interféron pégylé et de ribavirine. (recommandation conditionnelle, niveau de preuve modéré).

Elle indique toutefois que leur coût élevé (près de 40 000 € et plus de 26 000 €, respectivement au Royaume-Uni) est un obstacle à la prescription, en particulier dans les pays à faible revenus.

Les nouveaux antiviraux de deuxième génération sofosbuvir and siméprévir

Concernant le sofosbuvir, anti-ARN polymérase du VHC, les experts de l’OMS ont conclu que ses bénéfices « dépassaient largement » les risques associés.

Pour les génotypes 1,2,3,4 du VHC, le sofusbuvir, en association avec la ribavirine avec ou sans interferon pégylé (en fonction du génotype) devrait remplacer l’interféron pégylé et la ribavirine (Recommandation de niveau élevé, haut niveau de preuve).

Pour le siméprévir, anti-protéase du VHC, le groupe d’étude a conclu que les bénéfices étaient « considérables étant donné la courte durée du traitement, la très bonne réponse virale soutenue et le faible taux d’effets secondaires. »

Le siméprévir est recommandé en association avec l’interféron pégylé et la ribavirine chez les personnes infectées par le VHC de génotype 1b et de génotype 1a sans polymorphisme Q80K à la place du régime INF-PEG+ ribavirine seul (Recommandation de niveau élevé, haut niveau de preuve).

Pour ces deux traitements, le coût du traitement est, une fois encore, pointé du doigt (plus de 60 000 euros et plus de 47 000 euros, respectivement, pour le sofosbuvir et le siméprévir, pour 12 semaines de traitement aux Etats-Unis). « Les autorités compétentes pourraient ne pas autoriser l’utilisation de ces médicaments dans leur pays en raison de leur prix élevé », souligne l’OMS.

Elle précise, toutefois, qu’en février 2014, Gilead Sciences a annoncé que des génériques du sofosbuvir seraient disponibles dans 60 pays à faibles revenus. En mars, le laboratoire a annoncé que le sofosbuvir serait vendu 650 euros pour 12 semaines de traitement en Egypte.

Les recommandations européennes publiées en janvier dernier et déjà obsolètes ont été actualisées pour tenir compte des avancées thérapeutiques. Présentées au Liver International Congress, elles seront publiées prochainement sur le site de l’ European Association for the Study of the Liver (EASL).

Références :

  1. Guidelines for the screening care and treatment of persons with hepatitis C infection. OMS. Avril 2014

Posté

En

,

par

Étiquettes: